D’où vient le coton ? Quels sont les inconvénients du coton ? Coton bio ou oeko tex ? On se dit tout sans complaisance.
Sans que l’on y porte attention, sa douceur, sa souplesse et son confort nous enveloppent tout au long de la vie. Le coton est comme ça, discret, essentiel, il se plie en quatre, ne se défile jamais, accompagne nos mouvements du quotidien, et ne rechigne pas à vivre sportivement. Dressons son portrait, sans complaisance.
On rembobine.
Dès la naissance, alors que nous poussons notre premier cri plaintif, on nous couvre de coton pour pallier la rudesse du monde. Notre premier body, notre premier pyjama, notre premier doudou, notre première couverture sont faits de coton, parce que cette fibre naturelle est si douce et confortable qu’elle apaise les peines et les peurs. Si bien que le coton et l’homme filent le parfait amour depuis très longtemps. En Égypte, en Inde et au Mexique notamment, où des espèces de cotonniers ont été exploitées il y a quelques millénaires par les populations indigènes avant de migrer un peu partout dans le monde, à condition d’être sous les tropiques.
Au début de l’été, en Inde, les grandes fleurs du cotonnier herbacé (Gossypium herbaceum), d’un blanc ivoire, sont magnifiques. Elles évoluent ensuite vers le jaune puis le rose avant de se transformer en fruits, des capsules ovoïdes à quatre ou cinq loges contenant chacune six à douze graines. Aux prémices de l’automne, les capsules devenues sèches s’ouvrent alors en quartiers pour libérer, depuis leurs graines, des bourres de fils d’aspect soyeux, le coton. Parmi la cinquantaine d’espèces de cotonniers existant, quatre variétés ont été domestiquées par l’homme pour être cultivées. Elles se partagent la production mondiale de coton textile. La fibre produite sera plus ou moins longue et résistante, et donc plus ou moins adaptée à la confection de textiles de qualité. Ces fibres de cellulose quasiment pure pourront servir également à la fabrication du coton hydrophile, du papier, de matières plastiques, au rembourrage de matelas et de coussins. Quant aux graines, une partie d’entre elles serviront à planter de nouveaux cotonniers. En les pressant, on obtient une huile végétale d’assaisonnement ou de cuisson. Elles peuvent également servir à produire des tourteaux – riches en protéines – destinés à l’alimentation animale, être transformées en huile de coton pour la confection de cosmétique, ou encore entrer dans la composition de l’engrais de jardin.
Mais ce sont bien les propriétés des fibres du cotonnier, ce petit arbuste ligneux d’environ un mètre de haut en récolte (jusqu’à dix mètres de haut pour les espèces sauvages !), qui font la renommée du coton. Elles offrent des tissus hypoallergéniques, doux, absorbants, solides, qui s’entretiennent aisément, sont faciles à produire et par conséquent, sont abordables. Tout bon. Du moins en apparence, puisque la qualité des fibres dépend des apports en eau et en chaleur de la plante. Plutôt procédurier, le cotonnier aime recevoir 2 à 3 mm d’eau par jour lors de ses premières semaines, puis 6 à 8 mm au milieu de sa pousse [1]. Il requiert environ 120 jours de pluie, soit 700 mm par an. Pour indication, la pluviométrie annuelle moyenne à Paris est de 635 mm par an. Le cotonnier exige également chaleur et sécheresse lors de sa période de maturation – période qui précède la récolte – pour éviter que les fibres de coton contenues dans les capsules ne pourrissent avant d’arriver à maturité. Subtil équilibre donc que l’on retrouve sous des latitudes tropicales ou subtropicales, principalement en Amérique (USA, Brésil, Mexique, Argentine), en Afrique (Mali, Bénin, Burkina Faso, Nigeria) et en Asie (Chine, Inde, Pakistan, Ouzbékistan).
La récolte intervient cinq mois et demi à six mois et demi après avoir semé.
À la main ou mécanisée, elle consiste à extraire les fibres et les graines des plantes. S’ensuit l’égrenage qui sépare les fibres des graines. Après le tri des fibres suffisamment longues, des balles de coton sont constituées afin de faciliter le stockage et le transport jusqu’aux filatures où s’opère, entre autres, le cardage. Ce dernier vise à orienter dans le même sens les fibres de coton, les rendant parallèles en les séparant, les peignant et en les nettoyant des impuretés (branches, feuilles et autres déchets organiques) pour en faire des rubans de carde. On étire alors les fibres entre différents rouleaux pour harmoniser leur épaisseur, les rubans de carde sont réunis, étirés donc puis tordus afin d’obtenir le coton définitif, suffisamment solide pour supporter le tissage, le tricotage ou l’utilisation en fil de couture.
Vient alors le blanchiment ou la teinture, tous deux facultatifs. En effet, le coton existe naturellement coloré en ocre, kaki, gris-vert et mauve, mais la couleur crème, plus facile à teindre, est privilégiée.
[1] https://icac.org/SlideShare/SlideShareDetails?Id=16
Aujourd’hui, un quart de la production mondiale des fibres textiles provient du cotonnier [2]. Autrement dit, le coton est partout. Si bien qu’on l’oublie. Sa fibre est utilisée pour la mercerie (fils à coudre), la bonneterie (chaussettes, bas, collants, lingerie), la passementerie (décoration intérieure et vestimentaire), le linge de lit et de bain (draps, couettes, taies, serviettes).
Selon le type d’entrecroisement des fils de trame et des fils de chaîne, le tissage du coton offre trois armures principales (trois modes de tissage) : l’armure toile, l’armure sergé et l’armure satin. Ces armures sont à la base d’une grande variété de tissus allant, du plus fin au plus épais, du voile de coton au jersey en passant par la mousseline, le chambray, le tulle, le molleton, le vichy, le piqué, le denim, le velours et bien d’autres…
Cette variété de tissus se double d’une grande diversité d’usages. On troque volontiers sa chemise de bureau, son foulard ou son bleu de travail en coton contre un legging, un tour de cou ou un t-shirt de sport de la même matière. Les vêtements en coton sont à la fois souples et résistants, ce qui en font des alliés pour les sportif·ves adeptes d’activités physiques à intensité modérée. Le coton aime le mouvement, il accompagne parfaitement une marche rapide, une sortie vélo à un rythme de loisir ou une succession d’asanas (postures) de yoga. On évitera cependant de s’adonner à des sports trop intensifs, le coton est respirant certes, mais il possède également un pouvoir absorbant qui peut être contraignant en cas de forte transpiration. En bref, le coton n’a que faire de la performance, il privilégie le bien-être, le plaisir décontracté ! Sa popularité en témoigne.
[2] https://textileexchange.org/preferred-fiber-and-materials-market-report/
Le chiffre est désormais bien connu, il faut environ 8 000 litres d’eau [3] pour produire un jean. Il révèle (ou confirme) l’impact environnemental que provoque la culture du coton conventionnel. Elle nécessite beaucoup d’eau, un simple t-shirt ponctionne par exemple 2 500 litres [4]. La culture du coton prend part au troisième secteur (après la culture de blé et de riz) le plus consommateur d’eau dans le monde, l’industrie textile, soit 4 % de l’eau potable disponible sur la planète. Les besoins sont tels qu’ils induisent une tension sur les ressources en eau de certaines régions du monde.
En Égypte, en Ouzbékistan, au Pakistan et en Syrie, 40 % des surfaces cultivées en coton sont irriguées. L’irrigation épuise les ressources, l’exemple le plus frappant est celui de la mer d’Aral*, en grande partie asséchée pour alimenter les cultures de cotonnier.
[3] https://librairie.ademe.fr/cadic/1529/le-revers-de-mon-look.pdf?modal=false
[4] https://waterfootprint.org/en/
L’eau, excessivement utilisée, est également polluée avec les engrais chimiques destinés à augmenter le rendement des surfaces cultivées.
Ces engrais provoquent une pollution des sols et des sous-sols, tout particulièrement des nappes phréatiques, principales réserves d’eau potable pour l’homme. En résulte, entre autres conséquences néfastes, la prolifération d’algues toxiques pour les autres formes de vie aquatique. Bilan : l’eau potable est moins facile d’accès, les sols sont appauvris et la biodiversité est menacée. La culture du coton absorbe 4 % de ces fertilisants à l’azote et au phosphore dans le monde [5]. Les pesticides aussi sont très utilisés, car le cotonnier est sujet à de nombreuses maladies virales, bactériennes, cryptogamiques, ainsi qu’aux attaques des insectes et des acariens. Ainsi, bien que la culture du coton ne représente que 2 à 3 % des terres cultivées à travers le monde, elle absorbe 25 % des insecticides et 10 % des herbicides [6] produits sur la planète.
Des options ont été envisagées pour réduire l’usage de pesticides et augmenter encore le rendement. Les compagnies de biotechnologies ont développé des cotonniers génétiquement modifiés. En 2018, on comptait 24,9 millions d’hectares de coton OGM sur 32,9 millions de coton planté, soit 76 %[7]. Dans certaines régions du monde, au Burkina Faso notamment, suite à l’introduction du coton génétiquement modifié, les agriculteurs ont constaté après deux saisons que leurs récoltes avaient perdu en qualité, les fibres étaient devenues trop courtes. Par conséquent, la vente de leur récolte ne s’est pas faite au prix espéré et les coûts liés à l’achat des semences de coton transgénique, en moyenne 18 fois plus élevés que le coton non modifié, n’ont pas été compensés par un rendement accru. La rentabilité a alors chuté. De plus, les protocoles de ces cultures transgéniques sont très complexes, nécessitant une grande précision dans le dosage des engrais et des pesticides, pratique à laquelle les agriculteurs burkinabés ne sont pas coutumiers. Enfin, ce coton génétiquement modifié exige souvent plus d’irrigation, ce qui augmente alors les coûts et le stress hydrique des régions concernées.
[5] https://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-mode-qqf/
[6] OMS
[7] James, C. (2018). Global Status of Commercialized Biotech/GM Crops: 2018. ISAAA brief No. 54. International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications (ISAAA): Ithaca, NY. (en ligne)
La même promesse de rendement accru et d’une baisse d’utilisation de pesticides a été faite en Inde en 2002 lors de l’introduction du coton BT par l’entreprise Monsanto. Après quelques années de progression, le rendement des cultures de ce coton transgénique a stagné et de nouvelles maladies sont apparues le rendant vulnérable. En cause, la mauvaise qualité des semences, l’émergence de ravageurs secondaires, la résistance développée par le ver du cotonnier, la technologie du coton BT non adaptée aux conditions agricoles de l’Inde. En résulte l’usage de pesticides encore plus toxiques pour contrecarrer la résistance du ver du cotonnier, ou des ravageurs secondaires tels que les cochenilles, les pucerons et les thrips [8] qui ne posaient pas de problème aux variétés non génétiquement modifiées. On dénombre 780 variétés de coton transgénique en Inde, correspondant chacune à un type de sol particulier et à des besoins différents en engrais. Comme le précise Sridhar Radhakrishnan, de la Coalition pour une Inde sans OGM dans Le Monde, « Les petits paysans n'ont aucune idée de ce qu'ils achètent et savent encore moins comment faire pousser ces nouvelles variétés. Leur savoir-faire traditionnel est en train de disparaître. »
[8] Remarkable Success, and Four Ugly Facts. Field Questions, Stone, G.D., 2012. But Cotton. (en ligne)
Avec des semences plus chères, des cultures pas forcément plus rentables et résistantes, des protocoles compliqués à suivre, des conditions météorologiques et un cours du coton très variables, les agriculteurs indiens et burkinabés se retrouvent dans des situations stressantes avec, parfois, un surendettement critique.
Les impacts sociaux de la culture du coton ordinaire, conventionnel sont conséquents. Et ce n’est pas nouveau. Historiquement, la culture du coton a provoqué le développement du commerce triangulaire qui a déporté d’Afrique des millions d’esclaves noirs pour travailler dans les grandes exploitations aux États-Unis. Aujourd’hui encore, la culture du coton peut entraîner des désastres humains. En Chine, dans la région du Xinjiang, un rapport datant de 2020 élaboré par le chercheur allemand Adrian Zenz pour la fondation Victims of Communism et révélé par Libération, la BBC et le Süddeutsche Zeitung fait état de plusieurs centaines de milliers de personnes en situation de travail forcé dans la récolte du coton. Cette région située au nord-ouest de la Chine produit 85 % du coton chinois, ce qui représente 20 % du coton mondial. Elle est au cœur d’un immense plan d’expansion industrielle dont le coton prend une part importante puisqu’il représente 10 % de la valeur totale des exportations chinoises. L’objectif : baisser les coûts pour rester compétitif. Quitte à utiliser la force et imposer de très faibles salaires aux Ouïghours, ethnie turcophone musulmane majoritaire dans la région, au cœur de cet esclavagisme moderne. Outre la main-d’œuvre locale soumise à ce travail forcé, des prisonniers d’autres régions sont assignés au ramassage du coton par l’organisation Xinjiang Production and Construction Corps (XPCC). Afin de ne pas contribuer à ces graves violations des droits de l’homme, la traçabilité du coton représente un enjeu majeur, tant pour les lignes de production des entreprises acheteuses de coton, que pour les consommateurs férus de cotonnades. En somme, pour ne pas acheter du coton en provenance du Xinjiang, il faut avoir les moyens de savoir d’où il vient, il faut pouvoir le tracer.
Autre problème, de taille également, qui apparaît plus tard dans la fabrication des vêtements, la teinture. Pour avoir des fibres parfaitement blanches ou d’une couleur précise, on trouve des colorants azoïques cancérigènes, des traitements chimiques polluants, tels que le blanchiment au chlore ou des teintures aux métaux lourds. Si l’on reprend l’exemple du jean, la teinte en bleu indigo se fait par l’entremise de bains chimiques pour fixer la couleur, tout cela est hautement toxique pour la planète et pour les ouvriers exposés. Le sablage du jean aussi, qui consiste à donner un aspect usé ou délavé au pantalon, provoque pour les personnes en charge de cette opération l’inhalation de silice contenue dans le sable. De nombreux cas de silicose sont répertoriés. Évoquons encore le formaldéhyde, supposé rendre les vêtements infroissables et qui provoque toutes sortes de désagréments comme des allergies cutanées, des allergies respiratoires, des migraines, etc. Enfin, la confection d’un jean se fait dans différentes usines à travers le monde, si bien que les matières premières et les composants produits et rassemblés dans un jean fini et commercialisable cumulent jusqu’à 65 000 kilomètres de distance parcourue, soit une fois et demie le tour de la Terre. L’empreinte CO2 due au transport et la consommation de pétrole liée à la fabrication de tous les éléments d’un jean sont donc considérables.
De la récolte à la confection en passant par le filage, le tissage et la teinture, les pratiques de l’industrie du coton conventionnel, et plus globalement de l’industrie textile, portent en leur cœur des conséquences sociales importantes : exploitation des enfants, des femmes, salaires précaires et conditions de travail indécentes. Le tribut pour la planète est également lourd : épuisement des ressources en eau, pollution des sols, des sous-sols, des rivières, émissions de gaz à effet de serre, effets néfastes sur la biodiversité…
Afin de vivre dans un monde plus soutenable et responsable, et éviter au maximum ces dérives liées à la culture du coton, DECATHLON s’engage à fabriquer ses produits selon des démarches respectueuses de l’environnement et de l’humain.
Conscientes des enjeux du climat, de l'épuisement des ressources, et de ses conséquences sociales et environnementales, les équipes de DECATHLON ont pour objectif que 100 % de leurs produits soient conçus dans une démarche d’ecodesign d’ici 2026.
Sans être une solution miracle effaçant l’ensemble des impacts négatifs de la culture du coton, l’utilisation de fibres de coton recyclées et biologiques ouvrent des perspectives beaucoup plus durables que le coton conventionnel. À commencer par le coton recyclé qui constitue la meilleure option disponible. En effet, la réutilisation des fibres de coton existantes ne nécessite ni pesticides, ni engrais, ni eau et cette production émet environ dix fois moins de CO2 qu’un coton neuf. Aussi, sa fabrication génère des emplois en Europe, dans les filières de recyclage qui comprennent, notamment, de nombreux emplois d’insertion sociale. Le label Recycled Claim Standard (RCS) certifie la présence et la quantité d’un composant recyclé dans un produit final tandis que le Global Recycled Standard (GRS) ajoute à cette démarche de vérification de contenu recyclé dans tel ou tel produit, un contrôle des pratiques sociales, environnementales et chimiques responsables au cours de la production afin de minimiser les incidences qui peuvent y être liées.
L’usage de ces fibres évite le gaspillage de ressources naturelles. Le coton est récupéré par les associations et les entreprises de tri à partir des dons. La fibre est ensuite déconstruite puis refilée avec le broyage et le filage. Cette fibre peut ensuite être de nouveau tissée, cependant les fibres recyclées sont plus courtes et plus fragiles, c’est pourquoi elles sont souvent associées à de nouvelles fibres pour garantir la qualité et la durabilité des textiles.
Le coton biologique est une autre option. Sa production suit le même schéma – de la culture à la confection – que le coton conventionnel, cependant, l’impact social et environnemental est très différent. Avant même la plantation du cotonnier, les différences s’affichent, les graines ne sont pas traitées ou modifiées, il n’y a pas d’OGM. Le coton biologique est cultivé avec du compost naturel qui remplace les engrais chimiques et les pesticides de synthèse – les pesticides naturels sont admis. Donc pas d’endettement des agriculteurs lié à l’achat de semences onéreuses et de produits chimiques. Les sols restent sains et productifs, avec la rotation des cultures pour oxygéner la terre et la préserver des maladies. La santé des agriculteurs est, elle aussi, préservée, sans la manipulation de produits chimiques nocifs. Ceux-ci ne s’infiltrent donc pas dans les sols et sous-sols qui ne sont ni pollués ni épuisés.
En outre, les sols biologiques retiennent mieux l’eau et l’humidité puisqu’ils contiennent plus de matières organiques. Le cotonnier nécessite donc moins d’irrigation extérieure pour subvenir à ses besoins en eau. Les mauvaises herbes sont tolérées, pas d’insecticides ici. Sans épandage d’insecticides et de pesticides, la consommation d’eau est d’autant plus réduite. Les teintures sont réalisées sans métaux et autres substances cancérigènes, là encore, cela permet de réduire la consommation d’eau. Aucune substance toxique n’est utilisée dans la chaîne de production de coton bio, le rendant anallergique et plus agréable pour la peau, les conséquences sanitaires de la culture conventionnelle du coton sont ici écartées.
Afin de garantir une production écologique et socialement responsable, certains labels ont vu le jour durant ces dernières décennies. Le label international GOTS, créé en 2002, possède un cahier des charges particulièrement rigoureux, donc protecteur. Ce label indique, entre autres, que les fibres textiles proviennent à plus de 95 % – pour son niveau d’exigence le plus élevé – de l’agriculture biologique, que la production des vêtements portant celui-ci ne peut recourir à des substances toxiques ou cancérigènes et que le produit fini ne peut contenir aucun résidu de pesticides ou métaux lourds tels que le plomb ou le cadmium. Les OGM ne peuvent pas être utilisés. Sur l’aspect social, le label veille à ce que les conditions de travail lors de la transformation textile respectent les conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) : respect des droits des salariés, liberté syndicale, pas de travail des enfants, pas de travail forcé, sécurité du travail, salaires décents, etc.
En revanche, il ne tient pas compte des conditions de travail lors de la culture du coton. Les labels Oeko-Tex, garantissant, a minima, l’absence de produits chimiques toxiques, et Max Havelaar qui défend un revenu et des conditions de travail décentes pour les producteurs et leurs familles, sont également recommandés. À noter que les labels Okeo-Tex Made in Green et bioRe offrent la possibilité de tracer le produit certifié, donc d’avoir les informations concernant le ou les pays où il a été fabriqué et les étapes de production.
À la caisse, un t-shirt en coton biologique sera certes plus cher, mais sa qualité sera meilleure : plus doux, plus facile à travailler, avec une plus grande tenue dans le temps et un impact social et environnemental considérablement amélioré. Le développement de la production de coton biologique et recyclé apparaît comme l’un des leviers à actionner pour réduire l’impact environnemental du coton tout en garantissant de bonnes conditions de travail des ouvrier·es.
C’est la philosophie d’Isabelle Ranghino, chef de produit pour la marque de yoga chez DECATHLON. Instigatrice dès 2008 de l’écoconception à partir de coton biologique sur les produits de gymnastique dont elle avait la charge, elle continue de veiller, depuis 2017 et la création de la marque de yoga, à réduire l’impact environnemental lié au développement de ses produits.
« Le coton biologique provient d’Inde, il pousse là-bas, nous avons des bureaux là-bas. Ensuite, on le fait fabriquer sur place en Inde ou au Sri Lanka – filature, tricotage, teinture, confection – ce qui nous permet de réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Les produits finis sont envoyés en Europe. Le coton bio, je l’ai développé pour les valeurs environnementales et pour les valeurs humaines, respecter l’agriculteur, respecter le sol, respecter la biodiversité. Aussi, les personnes qui pratiquent le yoga sont très sensibles à ces questions puisque dans les préceptes du yoga il y a le ahimsa – la non-violence – qu’elles mettent en pratique par le respect du vivant au sens large. En Inde, on constate que la pratique du yoga se fait souvent dans des matières naturelles amples (lin, coton, chanvre). »
Aujourd’hui, Isabelle Ranghino et son équipe sont toujours à la recherche de nouveaux procédés pour réduire les impacts. Sont désormais utilisés des assemblages de coton biologique et de lyocell, une viscose d’eucalyptus issue de forêts gérées durablement, mais également le coton recyclé associé avec du coton biologique.
« Nous développons des produits à 70 % de coton bio et 30 % de coton recyclé pour s’améliorer en impact CO2. Pour l’instant on ne va pas au-delà de 30 % pour éviter d’avoir trop de fibres courtes, de pealing, de peluches sur le produit mais ça représente déjà quasiment un tiers de l’impact en moins. Bientôt, on va réutiliser des fibres déjà colorées, en l’occurrence un gris chiné rosé, on les prend telles quelles, sans les reteindre, elles seront broyées et effilochées avant d’être réutilisées dans cette teinte. »
En 2020, on comptait 588 000 hectares de surfaces dédiés à la culture de coton bio (environ 2 % des surfaces de culture du coton) avec une production de 249 153 tonnes de coton bio. Année record avant la crise du Covid-19, elle faisait suite à une croissance continue de quatre ans, avec une augmentation de 112 % entre 2016/2017 et 2020/2021. Mais la marge de progression est grande puisque seul 0,95 % de la production mondiale de coton est du coton bio. Chez DECATHLON, la part de coton issu de l’agriculture biologique est de 11 % tandis que celle du coton recyclé est de 2 %[9].
D’autres axes sont à emprunter pour que la culture du coton coûte moins à la planète : la durée de vie des textiles et la seconde main. Acheter moins, mais mieux, donner plutôt que jeter, utiliser des vêtements ayant eu plusieurs vies, sont des pistes pour enrayer les effets néfastes d’une production de coton uniquement orientée sur la quantité.
[9] https://engagements.decathlon.fr/lapprovisionnement-de-coton-chez-decathlon
« Le mieux du mieux du point de vue environnemental, précise Isabelle Ranghino, c’est d’avoir des vêtements qui sont tellement durables qu’on peut les porter encore vingt ans après. Mais aussi d’utiliser des vêtements qui ont déjà été produits, bien sûr. Je pense que le gros débat sera la durabilité des vêtements bientôt, pour tout le monde. »
Avec les autres fibres naturelles telles que le lin et le chanvre, le coton, distingué pour ses qualités de résistance et de douceur, est parfaitement à même de proposer des vêtements qui durent si bien dans le temps qu’ils œuvrent à l’avènement d’un monde plus durable, sobre et juste. L’or blanc a toute sa place dans le monde de demain.