Léa et Vincent : rencontre avec deux « malades de sport »

Léa et Vincent : rencontre avec deux « malades de sport »

Touché par un cancer en 2016, Vincent Guerrier, 26 ans à l’époque, a décidé de continuer le sport durant les traitements, malgré la frilosité de ses médecins. Course à pied, vélo, et même marathon…

Avec sa compagne Léa Dall'Aglio, Vincent Guerrier a découvert les puissantes vertus de l’activité physique sur la maladie. Depuis, les deux trentenaires, journalistes de métier, ont écrit un livre (Malades de sport) et réalisé un documentaire. Leur combat ? Que le sport-santé devienne, enfin, un soin à part entière. On les a rencontrés.

Léa et Vincent : rencontre avec deux « malades de sport »

Quelle place occupe le sport dans vos vies ?

Vincent : Personnellement, je suis un grand passionné de vélo depuis mes 10 ans. Je pratique aussi assidument la course à pied.
Léa : Je suis une sportive de longue date, moi aussi. J’ai pratiqué l’équitation pendant 15 ans. Aujourd’hui, je pratique surtout la course à pied et le vélo, le plus souvent avec Vincent.

Léa et Vincent : rencontre avec deux « malades de sport »

Pour vous deux, le sport a pris une autre dimension en 2016. Comment est-ce arrivé ?

V. : Tout vient d’une expérience personnelle. À l’été 2016, en effet, on m’a diagnostiqué un cancer du système lymphatique. J’avais 23 ans. Et l’une des premières questions que j’ai posées aux médecins fut : vais-je pouvoir continuer l’effort physique ? C’est le point de départ de notre aventure « Malades de sport ».

L. : La question était d’autant plus pertinente que la tumeur de Vincent était située entre les deux poumons, provoquant un réel essoufflement.

Faire du sport malade...  Qu’ont répondu les médecins ?

V : Je n’ai pas vraiment eu de réponse claire... Ce qui était étrange car, après avoir étudié la littérature scientifique, on a découvert que des dizaines d’études soulignaient les bienfaits de l’activité physique, notamment contre le cancer.

L. : Les médecins ont répondu que ce n’était pas contre-indiqué mais que Vincent se sentirait fatigué. Un radiothérapeute lui a dit que les traitements réduiraient sa capacité pulmonaire, et qu’il ne fallait pas s’attendre à courir un marathon…

C’est l’élément déclencheur. Vincent était très peiné par cette réponse, et par l’idée d’être privé d’ambitions sportives à seulement 23 ans. Je lui ai dit : allez, on va courir quand même, et on va le faire tous les deux !

Léa et Vincent : rencontre avec deux « malades de sport »

Vous avez donc couru, ensemble, en parallèle des Chimios. Quel a été le résultat ?

L. : On s’est rendu compte que c’était l’inverse de ce que prédisaient les médecins... Plus Vincent courait, moins il ressentait les effets secondaires des chimiothérapies.

V. : Avant de commencer à courir, je mettais parfois jusqu’à quatre ou cinq jours avant de me remettre d’une séance de chimio. C’était comme une longue gueule de bois ! Or, une fois repris l’activité physique, je retrouvais un état quasi normal dès le surlendemain de la séance de chimio. Au bout de 3 ou 4 mois de course, j’avais retrouvé une bonne condition physique.
Dès l’hiver 2017, je me suis inscrit au Marathon de la Route du Louvre, qui relie Lille à Lens. Plus que la performance, cela m’a permis d’avoir un plan d’entrainement, d’avoir une perspective et un objectif.

C’est d’ailleurs ce constat qui vous a donné envie de militer pour ?

V. : Absolument. La non-réponse des médecins et le manque d’infos disponibles nous ont fait réaliser, avec Léa, qu’il était urgent d’informer le grand public sur l’impact de l’activité physique sur la maladie.
L. : C’est pour cela qu’on a lancé, dès 2017, le site d’information Malades de sport, suivi d’un documentaire diffusé en 2020 (la vidéo juste en dessous), et d’un livre sorti en octobre dernier.

Comment avez-vous géré ce traitement par le sport ?

V. : Déjà, je ne parlerais pas de traitement, mais plutôt de « soin de support », qui vient en complément des traitements médicaux. Et puis je préfère parler d’activité physique plutôt que de sport, puisque l’idée est d’activer son corps sans esprit de compétition ou de résultat. Ceci étant dit, j’ai géré ça au feeling, car nous avons découvert qu’il existait peu d’accompagnement en la matière.

Qu’avez-vous découvert au cours de vos investigations ?

L. : Que les études étaient sans ambiguïté ! Dès les années 80, la science a montré les vertus thérapeutiques du sport. Il augmente la qualité du sommeil et réduit la fatigue des personnes malades, et baisse même le risque de récidive de 30 à 40% pour certains cancers (sein, prostate, colon).

Sur quelles maladies en particulier agit l’activité physique ?

L. : Ce serait long de toutes les lister… Mais on peut citer le diabète, les maladies cardiovasculaires, l’hypertension, la sclérose en plaque, l’obésité ou encore la dépression légère. Notre message aux professionnels de santé et aux patients, aujourd’hui, est de favoriser la pratique d’activité physique systématique dès le diagnostic.
V. : On peut aussi ajouter les maladies d’Alzheimer et de Parkinson. L’activité physique est en fait très efficace sur la majorité des maladies chroniques. Ce constat n’est pas anodin : ces dernières concernent quand même 20 millions de Français•es… !

Léa et Vincent : rencontre avec deux « malades de sport »

Depuis 2016, les généralistes peuvent d’ailleurs prescrire de l’activité physique en France…

V. : C’est vrai. Le décret d’application a été signé en mars 2017. C’est un premier pas très intéressant.
Reste que, pour l’instant, la pratique d’une activité physique sur prescription n’est pas remboursée. C’est la prochaine étape, que l’on appelle de nos vœux. D’ici là, il ne faut pas hésiter à interroger sa mutuelle, car certaines prennent en charge des forfaits dédiés.

Pour vous, Vincent, le sport a aussi eu un impact positif sur le moral.

V. : Oui, cela m’a permis de me sentir capable, à un moment où mon corps était en souffrance. Ça m’a donné beaucoup de confiance, notamment pour envisager l’après-maladie : le retour au travail me semblait moins inquiétant car j’étais physiquement prêt.

Conseillez-vous un sport en particulier ?

V. : Non, c’est vraiment du cas par cas ! Ce n’est pas tant le type de sport que le degré d’intensité qui compte. Il est important de commencer en douceur. À ce titre, la marche ou le vélo sont les plus simples à mettre en place.
L. : Il n’y a aucune contre-indication a priori. Boxe, natation, rugby… Notre conseil numéro 1, c’est de choisir une activité qui vous plait, pour ne pas se décourager en cours de route.

Pour se mettre au sport-santé, vers qui se tourner ?

V. : Le sport-santé demeure peu développé en France, c’est d’ailleurs l’objet de notre combat. Mais ça progresse, et il y a aujourd’hui plusieurs options : on peut se tourner vers les Maisons sport-santé, que l’on trouve sur l’ensemble du territoire, mais aussi directement auprès des fédérations sportives. Plusieurs d’entre-elles font de gros efforts, comme la Fédération française de rugby, et son programme Rugby Santé. Il y a aussi des initiatives régionales, comme Prescri’mouv, dans la région Grand-Est. Enfin, il y a beaucoup d’associations, comme Siel Bleu ou la CAMI Sport & Cancer.

L. : Un autre conseil est de bien choisir son encadrant. Idéalement, il faut préférer des encadrants formés, titulaires par exemple de la Licence STAPS Activité Physique Adaptée et Santé (APA-S). Mais cela peut aussi être un kiné ou un ergothérapeute. Et puis en parler à son médecin généraliste reste une bonne idée.

Léa et Vincent : rencontre avec deux « malades de sport »

Propos recueillis par Benjamin

Badminton (en double, c'est plus rigolo) le mardi et brasse coulée le samedi, telle est ma petite routine. Entrecoupée de longues marches en ville et de vélo à la campagne.

sport et cancer

Octobre rose : la prévention du cancer du sein avec le sport

L’activité physique régulière réduirait de 10 à 20 % les risques de cancer du sein. On vous dit pourquoi faire du sport, c’est contribuer à mieux se protéger.

sport après cancer

Octobre rose : les bénéfices du sport pendant et après un cancer du se

Le sport améliore la qualité de vie aussi lorsque l'on souffre d’un cancer du sein, et ce, pendant comme après le traitement. On en parle dans cet article.

sport et santé

Sport et santé : le sport sous prescription médicale

Le sport comme médicament ! Depuis mars 2017, les médecins peuvent prescrire une activité physique adaptée aux personnes qui souffrent d’une affection de longue durée (ALD). Sur le papier, ça semble génial. Mais en pratique, ça fonctionne comment ? Séries de pompes à faire dès le réveil ? Footing quotidien à réaliser ? La réalité est un peu plus complexe que ça. On va vous expliquer pourquoi.

Faire une activité physique pour mieux vivre avec le diabète

Faire une activité physique pour mieux vivre avec le diabète

On peut vivre avec le diabète et même faire une activité physique. Pierre Alexis Garron, professeur d'activité physique adaptée nous explique.

Coureur qui s'entraîne pour son premier marathon

Entrainement : préparer et courir un tout premier marathon

Courir un marathon, pour la première ou la centième fois, est toujours une expérience à part.

Photo de deux randonneurs au pied de montagnes

Notre magazine Engagements

La pollution plastique dans les océans, la fabrication en bois, la notion de durabilité... Le développement durable est bien l'affaire de très nombreux sujets !

Quand la prescription médicale... c'est du sport

Quand la prescription médicale... c'est du sport

Prescrire de l'activité physique ? Comment ça marche ? Qui peut y prétendre ? Quand on sait les bienfaits du sport santé, on fonce !