2. Demain, objectif ville verte et cyclable
Pour que demain, les cyclistes puissent arpenter la ville en sifflotant sur leur vélo de fonction, quelques petits aménagements urbains semblent nécessaires, comme l’expliquent Stein van Oosteren et Amandine Richaud-Crambes. En selle, en vous emmène dans la ville cyclable de vos rêves !
► Séparation, réduction de vitesse et du volume des voitures et réseau : le SRR, clé de la ville cyclable de demain
Pensée par Stein van Oosteren, la politique SRR serait une philosophie efficace pour une ville plus favorable aux cyclistes.
S pour "Séparer les voies cyclables des routes pour véhicules motorisés" : sans contact avec la source principale des dangers rencontrés par les cyclistes (à savoir : les véhicules motorisés), on réduit dès lors considérablement le nombre d’accidents chez ces derniers. De fait, les parcours arpentés par les cyclistes se font dans la joie, la bonne humeur et le coup de pédale fluide. “Aujourd’hui, le principal obstacle aux villes cyclables, c’est le manque d’aménagements sécurisés et adaptés aux cyclistes”, constate Amandine Richaud-Crambes.
Dans la ville cyclable de demain, à peine sorti.e de chez vous, vous accédez à une piste cyclable sécurisée en moins de temps qu’il ne faut pour dire “M12” (ndlr : les panneaux “cédez le passage” pour les cyclistes). Sur cette piste, vous ne risquez pas de voir votre roue heurter une bordure de trottoir, même petite, la largeur de celle-ci est pensée pour accueillir un flot conséquent de cyclistes et laisser doubler les plus rapides d’entre eux sans risque d’accident. Un feu rouge ou une intersection vous oblige à vous arrêter ? Même pas besoin de poser le pied à terre, une rampe vous attend pour vous tenir en équilibre sur votre bicyclette le temps que le feu repasse au vert.
R pour "Réduire la vitesse de circulation et le volume du trafic motorisé dans les villes" : Stein van Oosteren préconise ainsi un passage global aux 30 km/h dans les villes, contre les 50 km/h encore autorisés dans certaines communes aujourd’hui. “Ainsi, on baisse le taux de mortalité des accidents de la route, tout en augmentant la capacité à réagir des automobilistes”, précise Stein van Oosteren, “Mais une vitesse basse ne suffit pas pour mettre à l’aise les cyclistes. Il faut aussi adapter le volume des voitures qui passent, en coupant le transit motorisé dans les centres-villes et les rues résidentielles. Les automobilistes privilégieront ainsi les gros axes et ne passeront par les centres-villes que s’ils ont quelque chose à y faire (courses, habiter…). Cet apaisement permet à la vie locale d’émerger, dont le cycliste n’est qu’un effet secondaire -littéralement – heureux”.
R (encore, oui) pour "organiser les voies cyclables en Réseau" : tout comme on imagine difficilement une voie ferroviaire de dix mètres, pourquoi certaines pistes cyclables s’organisent en tronçons entrecoupés ? Piste cyclable, route, piste cyclable, route… Et on alterne jusqu’à destination. “Pour avoir une politique pro-vélos et mobilités douces efficace, il faut penser ce changement à l’échelle des intercommunalités et des métropoles”, souligne Amandine Richaud-Crambes, “et surtout, il faut que cette politique inclue tous les moyens de mobilité, qu’elle soit inclusive”. Les voies cyclables s’étendent ainsi de villes en villes, et permettent une fluidité dans le parcours du ou de la cycliste. Cela suppose également, selon l’experte, une communication entre les moyens de transport pour permettre à chacun·e de passer du vélo au bus ou au métro au cours du trajet, et ce, sans obstacle.
► Le carrefour hollandais, avenir de la ville cyclable ?
Le carrefour quoi ? Le carrefour hollandais, pardi, celui-là même pensé pour la sécurité des cyclistes, avec ses voies cyclables bien distinctes de celles empruntées par les véhicules motorisés. “Laisseriez-vous votre enfant se déplacer sur un carrefour où se côtoient poids lourds et vélos ? Non ? Alors pourquoi attend-on des cyclistes qu’ils et elles prennent ce risque ?”, questionne à raison Stein van Oosteren.
► Grenoble et Strasbourg : vitrines des bonnes pratiques françaises
Des modèles de villes cyclables en France, on ne va pas se mentir, il n’y en a pas non plus des masses. Cependant, Strasbourg s’est longtemps placée à l’avant-garde des bonnes pratiques en la matière, avec une politique pro-vélo enclenchée dès les années 70. Si le mouvement s’est depuis quelque peu essoufflé, Strasbourg reste un bon exemple de ville cyclable comparé au reste de notre hexagone, toutes régions confondues, “avec une part modale vélo de 15%”, selon les informations délivrées par la Fédération Française des Usagers de la Bicyclette (FUB).
Pour Grenoble, la vélorution (ndlr : contraction de vélo et révolution) est plus récente, avec le développement en 2019 du Chronovélo, un “réseau cyclable structurant offrant des itinéraires directs, confortables et sécurisés, afin d’attirer de nouveaux usagers du vélo, le tout au bénéfice d’un meilleur partage de l’espace public et des usagers, tous modes de transports confondus”, comme décrit sur le site de la Métropole. Si l’initiative connait quelques critiques, son exécution reste un premier pas significatif vers une ville pro-vélo.
► Allez, on se projette dans la ville cyclable de demain ?
La ville de demain, ce sont les cyclistes qui l’imaginent le mieux. Sur Twitter, les idées fusent sur ce point ! “Les villes en zone 30 avec double sens partout pour les vélos, le passage en sens unique de rues pour l’aménagement de pistes cyclables sur la chaussée libérée”, imagine un internaute, “des points d’eau à disposition et la location gratuite de vélos”, “des M12 bien plus systématiques”, “des parkings sécurisés gratuits et en grand nombre”, “la possibilité de prendre n’importe quel moyen de transport avec son vélo”, demande-t-on également sur le réseau de l’oiseau bleu.
Dans ce futur pro-vélo, des infrastructures facilitatrices et accessibles viennent enchanter les cyclistes : garages à vélos sécurisés et couverts installés dans chaque immeuble d’habitation et aux abords des pistes cyclables, pompes à vélo, jets d’eau pour nettoyer son matériel, distributeurs de rustines et de chambres à air positionnés à intervalles réguliers sur les voies vélo… La ville de demain ne connait que les crevaisons avec le sourire, et l’entraide entre cyclistes débutant.es et aguerri.es.
D’ailleurs, cette entraide et éducation au vélo s’enseignent dès l’école primaire et se poursuivent tout au long du parcours scolaire ! Nos petites têtes blondes (ou rousses, ou brunes… bref, vous avez compris) ont ainsi droit à des cours pratiques de sécurité routière chaque semaine en guise d’éducation physique et sportive, et se voient remettre par leur banque un vélo à l’obtention de leur baccalauréat, quitte à ce qu’il soit de seconde main pour allonger la durée de vie des biclous. Bin oui, un vélo, ce n’est pas gratuit et si l’on veut que tout le monde puisse s’y mettre, le futur doit aussi s’imaginer avec générosité !