Les réseaux sociaux pourrissent-ils le sport ?

Les réseaux sociaux pourrissent-ils le sport ?

Quand tout le monde se retrouve au même endroit pour prendre la même photo, ça donne quoi ? Des spots naturels qui souffrent. Il est temps d'en finir ?

L’été votre feed est envahi. De maisons blanches aux toits bleus grecques, de façades colorées de la côte amalfitaine. D’eau turquoise, de spritz et de bikini riquiqui. En effet, comme 95 % des personnes présentes sur les réseaux sociaux, vous avez eu l’impression que tout le monde passait du bon temps en Italie ou en Grèce, voire les deux. 

À l’instar de ces lieux de villégiature, les réseaux sociaux donnent une visibilité incroyable sur des sujets, jusque-là relativement confidentiels.

Désormais, il y a des restaurants où tout le monde souhaite manger, des hôtels où séjourner, des sacs à s’acheter ou des boutiques où se rendre.
Or, cet état de fait semble conquérir peu à peu tous les pans de notre vie. De la même manière, le sport ne fait pas exception et se voit, lui aussi, acquérir une certaine notoriété. Que ce soit en termes de pratique ou de lieux, les réseaux permettent de sortir du cercle des initiés. Mais la notoriété a ses bons et ses mauvais côtés. Il est donc légitime de se demander : les réseaux sociaux pourrissent-ils le sport ?

Les réseaux sociaux pourrissent-ils le sport ?
Les réseaux sociaux pourrissent-ils le sport ?

La visibilité des réseaux sociaux 

Facebook, Instagram, Snapchat, Tik Tok, Youtube… Cela vous est probablement déjà familier ! Il s’agit donc des principaux réseaux sociaux mondiaux en vogue à l’heure actuelle. On y partage notre vie, nos joies, nos peines, nos repas, nos tenues, nos achats, notre vie. Ces informations que l’on partage sont alors soumis à des mentions “j’aime” et des commentaires.

Les coachs l'ont d'ailleurs eux aussi bien compris et, pour beaucoup, construisent leur clientèle grâce à cette visibilité.

Les réseaux sociaux pourrissent-ils le sport ?

Parallèlement à l’expansion et au succès retentissant de ces plateformes, un nouveau métier a ainsi émergé. Ce sont les fameux influenceurs•ses. Ces hommes et femmes ont le point commun d’être considérés comme expert•e et légitime dans un domaine donné (mode, food, déco, sport…). Et il est vrai que, parfois, la légitimité de ces expert•es peut-être soulevée. Malgré tout, le terme d’influenceur•euse s’attribue de facto grâce à leur communauté acquise. C’est elle qui les propulse à ce rang et réunissent, dans certains cas, des communautés composées de milliers voire de millions de personnes.

Parmi les plus anciens, Norman sur Youtube rassemble 12,1 millions d’abonné•es, Noholita dépasse le million sur Instagram et Tibo Inshape cartonne auprès des petits et grands. Ce dernier a fait part de son salaire mensuel s’élevant entre 10 et 70 000 euros. Dès lors, plane toujours un a priori d'appât du gain qui remet en cause l’objectivité des avis formulés. Le monde de l’influence représente aujourd’hui surtout une visibilité incroyable pour les marques ou concepts qui s’arrachent, à prix d’or, leur partenariat. En effet, certain•es influenceur•euses peuvent être payé•es des centaines de milliers d’euros. La youtubeuse Enjoy Phoenix a ainsi révélé avoir reçu jusqu’à 97 000 euros par une marque de cosmétique.

Bon gré mal gré, la visibilité ne s’arrête pas aux marques. Elle se répercute sur tout ce qu’ils font, mangent, portent, visitent. Autrement dit, un sport peut devenir viral, mais un spot aussi.

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Le coeur balance

La situation se trouve analogue à celle des autochtones envahis de touristes durant les périodes de vacances. Partagés entre les aspects négatifs et positifs du tourisme, leur cœur balance. Quid des sportifs pratiquant sur un lieu précis, jusque-là relativement “secret”, qui voient débarquer des hordes de personnes parce qu’un influenceur a partagé ce spot ?

Conséquence directe, sentiers de randonnées, plages de surf ou petite station de ski ne sont plus réservés à quelques initiés. Or, le problème est réel puisque la foule a des répercussions directes sur la faune, la flore et la vie économique locale. Quid de la falaise islandaise qui s’est écroulée dû au passage incontrôlable des gens, suite au clip de Justin Bieber ? Des offices de tourisme, comme celle du Wyoming, ont même demandé à Instagram d’arrêter de géolocaliser les espaces sauvages. En effet, les déchets et le non-respect de la nature entraînent des dommages qu’il est nécessaire d’endiguer. Dès lors, les administrations prennent le relais et limitent, voire interdisent, la visite d’un lieu pour le préserver. Par exemple, pour ne pas mettre en péril la biodiversité de certains sites, WWF a lancé en 2021 l'opération “I protect nature”.

Les réseaux sociaux pourrissent-ils le sport ?

À première vue, il est donc légitime de ressentir un sentiment négatif. En effet, la tranquillité et la préservation induites par la non-connaissance d’une pratique et/ou un lieu est tellement appréciable ! Se sentant presque privilégié•e, il n’est pas question de se pointer aux aurores pour pratiquer de manière sereine.

Il est aisé de ressentir de l’empathie face aux sportifs aguerris, ayant trouvé le Graal. Imaginez, vous avez l’habitude de faire de la randonnée. Recherchant inlassablement des sentiers, parcourant cartes, testant et trouvant le bon endroit, tant mérité. Puis, un jour, un influenceur sportif, ou non d’ailleurs, parle de cet endroit dans sa storie Instagram. L’identification du lieu cliquable, la beauté du site et la musique qui va bien participent à glamouriser le lieu, le rendre désirable. Concrètement, ce ne sont pas 200 personnes qui ont vu cette storie, mais des milliers. Dès lors, tout à chacun désire y aller. Le problème réside dans l'immédiateté de la réaction et le nombre considérable de personnes touchées. Autrement dit, c’est la fin de la tranquillité.

Les réseaux sociaux pourrissent-ils le sport ?

Être là pour la beauté du sport ou du spot ?

En outre, une autre interrogation surgit. En effet, ces personnes sont-elles là pour l’amour du sport, de la pratique, où simplement parce qu'elles veulent faire de belles photos ? On pense aux stories de Pénélope Boeuf ou June Sixtyfive qui nous racontent une pratique courante en Grèce : payer pour entrer dans un restaurant ou un bar parce qu’il dispose d’une vue surplombant la baie. Conséquence : tout le monde veut filmer le coucher de soleil sur le son de Petit biscuit. On a donc assisté à des scènes assez surréalistes de personnes faisant la queue pour cette photo/vidéo. Le but n’était même pas d’en profiter en prenant la mesure de ces instants, mais seulement de prendre cette photo.

Dès lors, la motivation réelle des personnes submergeant les lieux de pratique des sportifs•ves chevronné•es se soulève. Et, avec elle, l'hostilité occasionnée envers eux•elles.

Enfin, à qui la faute ? Au monde de l’influence qui partage l’information ? Aux personnes y allant “pour en profiter” ? Les réponses ne sont pas si catégoriques et, en plus, ne feront pas avancer le débat. Le débat étant, en faisant la promotion d’activités sportives et de lieux où les pratiquer, leur influence n’est-elle pas, finalement, positive ?

Les réseaux sociaux au service du sport ?

On le sait, les bienfaits du sport sont avérés, incroyables et quantifiables. Il serait universellement bon que tout à chacun s’y mette. En effet, les bénéfices dans une société à 100 à l’heure, dans une journée où l’on a ni temps, ni énergie et où le stress omniprésent nous cause bien des maux, sont bels et bien présents. Mais encore faut-il trouver la motivation ! Or, pourquoi celle-ci ne pourrait-elle pas naître du monde de l'influence ?

Autrefois monopole des médias, les exemples de pratiques qui se sont démocratisées et rencontrant un vif succès ne manquent pas. Ne vous rappelez-vous pas des Yamakasis qui ont suscité un engouement incroyable dans l’art du déplacement urbain ? Des films de danse, promouvant le breakdance comme une discipline à part entière ? Encourageant les jeunes générations à se dépasser et se révéler ? Les grand•es footballeur•euses ne sont-ils pas, eux aussi, des influenceur•euses, garantissant la pérennité du football en club ?

Finalement, les deux argumentations se valent. Il est à la fois légitime d’être blasé•e parce qu’un spot a été lâché et que tout le monde s’y pointe la bouche en cœur. Mais c’est également bon d’y trouver du bon.
Même si 10 % se prend de passion pour la pratique, peut-être que ces 10 % n'auraient jamais fait de sport ni connu les bénéfices. Enfin, le sujet s'oriente peut-être davantage sur l’art et la manière de dire les choses, de s'accorder sur les codifications.
Et finalement, on peut se dire que seul•es les passionné•es resteront, que l’on peut aussi faire de belles rencontres. Sans oublier, les opportunités. Celles d’expert•es et passionné•es, jusqu’alors méconnu•es, pouvant acquérir une grande visibilité. Dès lors, leurs travaux, recherches, conseils, infos et astuces auront les répercussions méritées.

Les réseaux sociaux pourrissent-ils le sport ?

Pauline

La boxe et le Pilates, pratiques paradoxales qui me représentent bien. Il s'agit d'une question d'équilibre. Entre la lenteur des mouvements et le défouloir. Mais, également, entre mes différentes activités, dont l'écriture. Plume (digitale), je mets des mots sur tout, pour tous.

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